[L]e 8 février 1962, à l’appel des syndicats et des partis de gauche, les Parisiens se rassemblent autour de la place de la Bastille pour dénoncer les attentats de l’OAS (Organisation de l’Armée Secrète). Une charge de la police s’achève dans les couloirs du métro, faisant neuf victimes.
Depuis plusieurs mois, les clandestins de l’OAS (Organisation de l’Armée Secrète) multiplient les attentats contre les officiels français accusés de négocier l’abandon de l’Algérie avec le FLN.
Le 7 février 1962, une charge de plastic est déposée sur un rebord de fenêtre au domicile du ministre des Affaires culturelles, André Malraux, 19 bis, avenue Victor Hugo, à Boulogne-sur-Seine.
Des éclats de verre blessent cruellement une fillette de quatre ans, Delphine Renard. L’émotion est immense et les syndicats et partis de gauche appellent les citoyens à se rassembler place de la Bastille, à Paris, dès le lendemain soir, jeudi 8 février 1962.
Le ministre de l’Intérieur Roger FREY interdit la manifestation dans la crainte de débordements. Le préfet de police Maurice Papon, qui s’est déjà illustré dans la répression du 17 octobre 1961, déploie d’importants effectifs de police sur la place de la Bastille pour en interdire l’accès.
En début de soirée, les manifestants, qui se sont néanmoins agglutinées aux alentours, commencent à affronter les policiers. Ces derniers chargent la foule…
Sur le boulevard Voltaire, des manifestants croient échapper aux coups de matraque en descendant dans le métro Charonne. À 20 heures, tandis que la foule commence de se disperser, des policiers s’acharnent sur la cohue qui se presse dans les escaliers et les couloirs du métro. Certains sont poursuivis jusque sur les quais car, contrairement à la première version de la police, les grilles de la station n’avaient pas été fermées.
Les affrontements sont d’après les témoignages d’une rare violence. Des policiers s’acharnent à coup de matraque sur des blessés tombés à terre, au lieu de les soigner. D’autres, dit-on, jettent sur les manifestants des plaques métalliques normalement destinées à protéger les arbres ! Des manifestants sont balancés par-dessus la rambarde du métro jusque dans les escaliers.
À l’heure du bilan, on comptera huit morts victimes d’étouffement ou d’infarctus, non compris un blessé qui décèdera trois mois plus tard. Quasiment toutes syndiquées à la CGT et membres du Parti communiste. Le plus jeune est un ouvrier de presse de 15 ans, Daniel Féry. Les affrontements font aussi une centaine de blessés parmi les manifestants et un peu plus de deux cents parmi les forces de l’ordre.
Le 13 février suivant, plusieurs centaines de milliers de personnes accompagneront les victimes au cimetière du Père-Lachaise. Quarante jours plus tard seront signés les accords d’Évian, mettant fin à la guerre d’Algérie mais non aux dissensions et aux ressentiments nés de celle-ci, tant parmi les Algériens que parmi les Français.